jeudi 4 septembre 2014

L’affaire « Eglise - Galilée » à l’éclairage de l’époque moderne (2/2)

3 – Alors, l’Eglise et Galilée ?

Tout le monde le sait : l’Eglise a condamné Galilée pour avoir affirmé que la Terre tournait autour du Soleil, et non l’inverse comme on le croyait à l’époque. Mais tout le monde ne sait pas comment cette affaire s’est passée exactement.

Tout d’abord, à cette époque, la plupart des grands penseurs croyaient au géocentrisme (le Soleil tourne autour de la Terre). Donc, l’Eglise n’a pas eu le monopole d’une difficulté à faire évoluer sa mentalité.

Néanmoins, quelques années plus tôt, c’était au pape Paul III que Nicolas Copernic avait dédié, vers 1540, son ouvrage le plus célèbre, "De la révolution des corps célestes", où il faisait un excellent exposé de l’héliocentrisme (la Terre tourne autour du Soleil). Et Johannes Keppler avait publié, dix ans avant Galilée, un ouvrage sur l’héliocentrisme, où il développait les thèses de Copernic. Donc, Galilée n’a pas été le découvreur de l’héliocentrisme et l’Eglise n’était pas figée unanimement dans une fausse croyance.

Galilée aurait pu, sans courir de trop grands risques, proposer l’héliocentrisme comme une théorie ou une méthode apte à expliquer de manière plus simple le mouvement des planètes. Ses difficultés surgirent dès lors qu’il cessa de le proposer comme une simple théorie scientifique et commença à le proclamer comme vérité, bien qu’à l’époque il n’en existait aucune preuve probante (il faut insister sur ce point particulier : Galilée n’a pas su prouver entièrement l’héliocentrisme).

Néanmoins, Galilée ne se serait pas attiré autant d’ennuis s’il s’était cantonné dans le domaine scientifique. La querelle est venue du fait qu’il avait transporté cette question dans celui de la théologie, proclamant que cette théorie était contraire à certains passages de la Bible. L’Eglise n’apprécia pas que Galilée se porte sur ce terrain qui n’était pas le sien, d’autant plus qu’en 1616, année du premier procès de Galilée, l’Eglise venait tout juste de sortir de l’épreuve de la Réforme, et que l’un des sujets de controverse avec les protestants concernait précisément l’interprétation individuelle de la Bible[1]. Les théologiens n’étaient donc pas disposés à prendre en compte la théorie héliocentrique fondée sur l’interprétation d’un laïc : l’époque ne s’y prêtait pas ! Pourtant Galilée s’est entêté à porter le débat sur le plan théologique. Il ne fait aucun doute que, s’il s’était cantonné au domaine purement scientifique, la question ne se serait pas enflammée au même point.

De plus, tout au long de cette affaire, Galilée a fait plusieurs erreurs de comportement qui ont renforcé la querelle. En voici deux exemples :
-   le pape Urbain VIII, qui apprécie Galilée, ne veut pas qu'il fasse figurer dans son Dialogue sur les deux grands systèmes du monde des arguments trop peu convaincants notamment à propos de sa théorie sur les marées, conseil dont Galilée ne tiendra pas compte ;
-   Galilée, qui veut écraser ses adversaires, publie son dialogue en demandant l'imprimatur, c'est-à-dire l'approbation de l'Église. Il piège Mgr Riccardi, maître du Sacré Palais, qui avait la mission d'inspecter le dialogue. En effet, lors de l'inspection, Mgr Riccardi n'a connaissance que de la préface et de la conclusion dans lesquelles Galilée ne dévoile pas ses vraies intentions.

La condamnation de Galilée est immédiatement commuée par le Pape en résidence surveillée. Le scientifique n'est donc jamais allé en prison et continua même à percevoir les revenus de deux bénéfices ecclésiastiques que le souverain pontife lui avait octroyé. La deuxième sanction : la récitation des psaumes de la pénitence une fois par semaine pendant un an, sera effectuée par sa fille religieuse carmélite.
Comme le remarque le célèbre scientifique et philosophe, Alfred North Whitehead (1861 – 1947), à une époque où de nombreuses « sorcières » furent soumises à la torture et au bûcher par les protestants en Nouvelle-Angleterre, « la pire des choses qui pouvait arriver à des hommes de science comme Galilée, était de purger une peine honorable d’assignation à domicile assujettie d’un léger blâme ».

Le pape Benoît XIV autorisa les ouvrages sur l’héliocentrisme dans la première moitié du XVIIIème siècle.

L’Eglise a donc bien condamné Galilée à tort. Mais, la condamnation a été légère (assignation à domicile, dans un grand confort et de courte durée), et elle portait sur les conséquences théologiques que voulaient en tirer Galilée.

N’oublions pas enfin que l’Eglise a de très longue date été proche des scientifiques et qu’aujourd’hui encore elle a son propre observatoire astronomique au Vatican où y exercent des sommités scientifiques. Par exemple, le père du Bing bang est le chanoine catholique belge Georges Lemaître.



[1] Notons que beaucoup de protestants (dont Luther) rejetaient également l’héliocentrisme.

L’affaire « Eglise - Galilée » à l’éclairage de l’époque moderne (1/2)

Cette question n’est pas d’actualité médiatique. Je l’aborde parce que, à la suite de plusieurs lectures d’aujourd’hui, je la trouve éclairée de manière différente de la version officielle et largement répandue. Pour ceux qui se disent catholiques, cela pourrait leur permettre d’avoir moins de complexes sur cette question. Pour les autres, cela pourrait leur permettre d’atténuer leur vision négative de l’Eglise !


1/ Puisé dans « E=mc², la biographie de la plus célèbre équation du monde »[1]

Vers la fin du XVIIème siècle, se posait une question scientifique : pourquoi Io, lune de Jupiter censée orbiter autour de sa planète en 42,5 heures, ne respectait pas sagement son horaire ? Beaucoup pensaient que Io était mal équilibrée et qu’elle oscillait sur son orbite. D’autres se demandaient si des nuages ou d’autres perturbations autour de Jupiter pouvaient fausser les observations.
Römer, jeune scientifique danois, se demandait, lui, si cela ne venait pas du fait que la lumière mette du temps à nous parvenir de la lointaine Jupiter. Mais c’était une idée insensée pour cette époque où l’on croyait que la vitesse de la lumière était infinie.
Pour vérifier son hypothèse, il proposa une expérience ayant pour but de prouver que Io, après avoir été masquée par sa planète, ne réapparaîtrait le 9 novembre 1676 qu’à 17h37 exactement, et non 17h27 selon l’hypothèse d’une vitesse infinie de la lumière. Io réapparut à 17h37mn49s !!

Et pourtant, les astronomes européens se refusèrent à admettre que la lumière voyageait à une vitesse finie. Ce n’est que 50 ans plus tard que de nouvelles expériences convainquirent les astronomes que Römer avait eu raison.

2/ Puisé dans « Les indices pensables »[2].

Pasteur a mis fin à la croyance en la génération spontanée en 1861, mais cela n’a pas empêché Darwin de continuer à y croire, comme il l’écrivait à son ami Joseph Hooker en 1871, à peine 10 ans après la démonstration de Pasteur : « La vie est apparue dans un petit étang chaud, dans lequel il y avait un riche bouillon de produits chimiques organiques, à partir desquels s'est formé le premier organisme primitif à la suite d'une longue période d'incubation durant les temps géologiques ».

Plus fort encore : beaucoup de scientifiques continuent à dire que la vie est née de la matière inerte par génération spontanée. Pour cela, disent-ils, il faut 5 conditions : de l’eau, de l’oxygène, de la lumière, une bonne température et une bonne pression. Or, nous savons aujourd’hui que ces conditions sont nécessaires mais pas suffisantes.

En effet, la vie a un code génétique que n’a pas la matière, code constitué d’un alphabet comprenant 4 lettres (quatre molécules). Mais il faut aussi un second langage pour que puisse apparaître la vie, celui de protéines composé de 20 acides aminés qui en sont les mots. Enfin, ces deux langages ne peuvent communiquer entre eux : il leur faut un traducteur qui leur permet d’agir de concert. Ce traducteur a été découvert il y a dix ans : ainsi dans chacune de nos cellules, les instructions de l’ADN sont-elles traduites dans le langage de protéines pour que, sur les chaînes de montage (les ribosomes), soient construites les protéines dont j’ai besoin pour vivre.

On pourrait suspecter cette présentation sous forme de langages et d’alphabets d’être un artifice destiné à influencer le lecteur. Mais, vous pouvez vérifier vous-mêmes cela car le prix Nobel de chimie a été décerné en octobre 2009 à trois chercheurs qui ont travaillé sur ce sujet dont l’intitulé est vérifiable sur internet : « Comment fonctionne le traducteur entre les deux langages, celui de l’ADN et celui des protéines ? »

Or, pour inventer et mettre en place un système intelligent (ce que sont ces alphabets), l’expérience nous enseigne qu’il faut de l’intelligence, ce que n’a pas la matière.
Ainsi la découverte de ce système génial relance le vieux débat entre Aristote et Démocrite : « Les atomes sont-ils capables de s’organiser tous seuls, sans aucune instruction intelligente, pour créer des tulipes, des hamsters, des êtres humains ? ». Autrement dit, plus les progrès des sciences avancent, plus  les conditions nécessaires à l’apparition de la vie se révèlent exiger de l’intelligence et même du génie.

Mais ces découvertes continuent à être passées sous silence par de nombreux scientifiques : on continue toujours à enseigner que la vie est née quelque part de la matière inanimée. On laisse entendre que toute trace d’eau sur Mars, ou sur toute autre astre, serait une preuve que la vie y a peut-être existé. Moi-même, j’ai assisté à une conférence d’un scientifique il y a un an qui démontrait qu’il avait pu mettre en évidence l’apparition de la vie quelque part sur Terre, à partir d’un bouillonnement particulier de matière au fond des océans. 150 ans après Pasteur !

Ces deux exemples, parmi beaucoup d’autres, montrent qu’il n’y a pas que l’Eglise qui puisse ne pas croire à une vérité scientifique, puisque même des scientifiques ont des blocages intellectuels !



[1] David Bodanis, Ed. Plon
[2] Brunor, Ed. Jubilé.