mardi 17 novembre 2015

Des kamikazes ? Comment cela peut-il se faire ? Que faire ?


La question que beaucoup se posent à la suite des attentats du 13 novembre à Paris est la suivante : comment peut-on perpétrer de telles actions si effroyables et si barbares ?

La question que l’on se pose ensuite est celle-ci : que faut-il faire ?

1 - Comment peut-on perpétrer de telles actions si effroyables et si barbares ?

En tout jeune garçon se développe une capacité de puissance physique qui va chercher à s’exprimer : c’est inscrit dans sa nature, on peut dire que c’est une loi de la nature.

Adolescent et jeune homme, il sentira monter en lui de nombreuses pulsions de combat pour mettre en jeu cette puissance interne.

Le besoin de pouvoir et de puissance n’est pas mauvais en soi. Face aux difficultés de la vie, il faut, en effet, pouvoir avoir l’énergie de surmonter les épreuves et les dangers, qu’ils soient physiques ou moraux. Le désir de pouvoir devient mauvais quand il conduit à opprimer ou détruire.

Chez certains, ce désir de puissance restera sous un seuil acceptable pour la société et pour leur environnement : ils ont, en effet, une nature plutôt tranquille ou bien contrôlée. Alors que d’autres ont une nature plus bouillonnante : chez eux le désir de puissance et d’expression physique se montre plus nettement et assez tôt.

L’éducation familiale et la culture ont pour mission de permettre au jeune homme d’orienter positivement ce désir de puissance. On observe, en effet, qu’une personne qui a peu de capacités à s’exprimer oralement aura la tentation de s’exprimer physiquement.

On peut donc dire que les jeunes gens qui basculent dans la violence ont probablement un défaut d’éducation et de culture. Mais cela ne remet pas systématiquement en cause l’éducation de leurs parents, car les adolescents sont très perméables à tout ce qui vient de l’extérieur de leurs familles : les camarades, leur bande de copains, les jeux vidéos, les chansons, les médias, … Ils peuvent être, également, très attirés par des jeunes un peu plus âgés, des « grands frères » de mauvais aloi, qui peuvent les conduire sur des voies de violence sous couvert de lutte contre la pauvreté, l’injustice, le chômage, …

Voilà pourquoi plusieurs basculent vers des mouvements extrêmes, tels les mouvements terroristes qui vont leur permettre d’utiliser des armes à feu (le comble de la violence et de la puissance), d’exprimer toute la violence qui sourd en eux et de se battre pour une idéologie simpliste mais efficace : l’embrigadement revient à démultiplier ce sentiment de puissance au sein de bandes ou de mouvements organisés. L’enrôlement dans des mouvements puissants déchaîne alors des pulsions d’horreur inouïes et terrifiantes.

Lorsque j’étais jeune, la société était moins policée qu’aujourd’hui : un jeune homme, pour devenir un homme, se devait de fumer, boire et « baiser », mais aussi de manifester ses désaccords à mains nues. Beaucoup de problèmes se résolvaient dans des bagarres où chacun pouvait montrer sa virilité.

Mais l’on voit que notre société d’aujourd’hui, qui nous paraît plus policée, n’arrive pas à éradiquer la tentation de violence. Il faut d’ailleurs être conscient qu’elle n’y arrivera jamais car, à la base de ces mauvais comportements, il y a la capacité de tout homme à faire le bien mais aussi le mal : c’est inscrit en chacun de nous. Nous aurons donc toujours à lutter pour ne pas être des barbares et pour que nos enfants, au sens large de la société, ne deviennent pas des barbares. Le combat ne sera jamais vraiment gagné.

2 - Que faut-il faire ?

2.1 - Tout d’abord, être un homme de paix.

Cela peut paraître dérisoire au regard des enjeux internationaux, mais l’on sait que les petites rivières font de grands fleuves. Si je suis un homme de paix, même sans discours ou morale explicite, je serai une invitation à l’établissement de relations plus cordiales tout autour de moi. Savoir ne pas se mettre en colère pour un rien, ne pas dire systématiquement du mal des autres, accepter que des avis divergent, rester calme dans les conversations, ne pas s’irriter pour la moindre gêne causée par ses proches ou ses voisins, savoir discerner ce qui est bon chez l’autre, …
La paix n’est pas la résultante de textes, d’accords ou de systèmes mais la somme de personnes oeuvrant ensemble pour vivre en paix.

Or, les conflits naissent tout au long de notre vie avec ceux qui nous sont proches. C’est déjà là que se situe la première lutte pour la paix dans le monde. Avant même de parler d’Al Qaïda ou de Daesh, regardons les actualités de notre société, faites de meurtres, de saccages, de passages à tabac, de justice personnelle.  Chaque fois qu’une personne agit dans un esprit de paix, elle a un  impact positif sur son entourage, elle peut devenir exemple pour ceux qui la côtoient, elle limite la violence localement.

2.2 - Est-ce à dire qu’il faut être un pacifiste ?

Etre pacifiste est généreux et très respectable. Un vrai pacifiste est un homme de caractère, capable d’endurer de grandes épreuves sans entrer lui-même dans la lutte : Ghandi en est un exemple idéal. Mais le pacifiste doit être aussi réaliste car il ne saurait dire « Tout le monde il est gentil ».

Les pacifistes reconnaissent certainement combien il est important, lorsqu’il y a de graves incidents comme aujourd’hui, que des personnes soient préparées à nous protéger et à lutter contre les terroristes ou contre d’autres formes de forces armées.

Dans ce monde où les forces du mal ne seront jamais éradiquées, il est nécessaire qu’un Etat ait des capacités de défense armée (police, gendarmerie, armées) pour endiguer les actions visant la sécurité de l’Etat et du peuple.

2.3 - Ensuite, éradiquer Daesh.

Cette organisation s’est puissamment installée en Irak et en Syrie, tout en essaimant ailleurs (Cameroun, Afghanistan, …).

Son objectif est celui de l’extension du califat, sans limite à cette extension. Ses méthodes son guerrières et barbares, en cela qu’elle ne reconnaît pas les lois de la guerre. Sa force militaire est grande, soutenue par des finances très bien approvisionnées.

Avec ce genre d’organisation, il n’est pas envisageable de traiter ou de négocier. La lutte jusqu’au bout est donc une nécessité. Aujourd’hui deux coalitions luttent contre elle, mais avec des divergences d’objectifs encore trop grandes pour qu’elles puissent se renforcer mutuellement. Par ailleurs, tous les pays participant à ces deux coalitions ont des objectifs particuliers qui s’opposent entre eux.

Les Américains ont pour but de combattre Daesh : leurs alliés sont les rebelles syriens, le PKK (Kurdes) et la Turquie, leurs ennemis sont Daesh, le régime d’Assad et l’Iran.

Les Russes ont pour but de maintenir le régime d’Assad : leurs alliés sont le régime d’Assad, l’Iran et le PKK, leurs ennemis sont les rebelles syriens, Daesh et la Turquie.

La Turquie a pour but d’empêcher l’émergence d’un Kurdistan indépendant : leurs alliés sont les rebelles syriens, leurs ennemis sont le PKK, le régime d’Assad, Daesh, la Russie et l’Iran.

Heureusement, Daesh est l’ennemi commun de tous !! C’est le plus petit commun dénominateur !

A l’heure où j’écris ce texte, le Président de la République française vient de décider d’agir en concertation avec la Russie : voilà un grand pas fait dans le bon sens.

Quoiqu’il en soit, pour éradiquer Daesh et les mouvements terroristes au Sahel, il faut des forces armées importantes et entraînées. La France est à la limite de ses engagements possibles avec ses moyens actuels, ce qui est bien trop peu.

2.4 - Donc, « Si vis pacem, para bellum ».

Lors de la chute du mur de Berlin (1989), puis de celle de l’union soviétique (1991), beaucoup ont voulu engranger les dividendes de la paix, c'est-à-dire diminuer de manière drastique les forces armées. Cela paraissait raisonnable, mais cela aussi manquait de raison : le monde est resté dangereux. Certes, nous avons pu croire que l’Europe était dorénavant à l’abri des conflits. Mais, c’est avoir une lecture de l’histoire très étroite : les périodes de paix n’ont jamais duré des siècles, quelque soit le moment de l’histoire ou le lieu.

Certains semblent donc avoir eu pour devise : « Si vis pacem, vivi in Europam » (si tu veux la paix, vis en Europe). Ils ont oublié la sagesse latine et sa devise pourtant si connue : « Si vis pacem, para bellum » (si tu veux la paix, prépare la guerre).

Il est clair que le monde reste dangereux, que les formes de danger évolueront (aujourd’hui c’est, pour une bonne partie, Daesh) et donc qu’ils nous faudra toujours être capables de nous protéger et d’intervenir hors de nos frontières. En effet, il ne s’agit pas d’avoir seulement une posture défensive, car l’adversaire, quelqu’il soit, aura toujours l’avantage de porter son action là où il le jugera le plus favorable pour lui : aucun dispositif défensif ne peut être étanche. Il ne s’agit pas non plus d’être interventionniste, c'est-à-dire avec exagération, mais d’être capable d’aller là où le danger se manifeste pour le contrer au mieux et au plus tôt.

Or, aujourd’hui, les efforts de défense des pays de l’Union européenne sont bien trop faibles, y compris celui de la France qui est pourtant l’un des plus élevés. En 2014, il a été pris la décision de porter les dépenses de défense à 2% du PIB de chaque Etat de l’OTAN : dans l’Union européenne, seule la Grande-Bretagne est à ce niveau (2,5%). La France, qui vient juste après, n’est qu’à 1,5%, beaucoup d’Etats étant à peine à 1%.

Pour se rendre compte de la faiblesse des effectifs militaires en France, il suffit de savoir qu’il y a plus de personnel à la SNCF que de militaires de l’armée de Terre, et que l’ensemble des effectifs de l’armée de Terre pourrait tenir dans 1,5 fois le stade de France !! Est-ce vraiment sérieux ?

2.5 - Réviser certaines de nos alliances

Daesh continue à être un ennemi fort car il est soutenu, tout particulièrement financièrement, par l'Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie. Or, ces trois pays sont des " alliés " des Etats-Unis et de la France !

Il importe donc de revoir nos relations avec ces trois pays, quelles qu'en soient les conséquences financières (contrats d'armement par exemple).

Il est temps de revoir nos relations avec les Etats-Unis : il nous appartient de déterminer notre politique par nous-mêmes et non de nous aligner trop systématiquement sur celles des Etats-Unis.

Enfin, il faut savoir faire preuve de plus de réalisme vis à vis de la Syrie : Daesh est vraiment notre ennemi et non Bachar El Assad ! Ce qui devrait nous faire revoir nos alliances avec la Russie et avec l'Iran.





dimanche 1 novembre 2015

Premier ministre, tweeter et boule de billard


De l’homme politique, on attend une vision élevée, du recul face aux événements, une projection à moyen ou à long terme.

Mais on sait aussi que l’homme politique, en charge du gouvernement de la France, doit agir en fonction de l’actualité quand celle-ci impacte directement l’action du gouvernement. Cette action doit s’appuyer sur sa vision à long terme, afin qu’elle ne soit pas brouillonne, voire incohérente par manque de préparation.

A l’occasion de la découverte des hausses très fortes des taxes locales, le premier ministre vient de s’exprimer en reconnaissant que les hausses d’impôts, depuis plusieurs années, ont été excessives.

Il a donc fallu une goutte d’eau (les taxes d’habitation et foncières de 2015) pour reconnaître un océan d’augmentation d’impôts. Cela marque un manque de vision et de projection : ce constat aurait dû être fait plus tôt, le gouvernement ayant tous les moyens pour cela !

Une chose qui me dérange beaucoup dans cette histoire est que le Premier ministre se soit expliqué (également) par Tweeter : « Fiscalité locale des retraités : notre engagement est simple, neutraliser l’impact d’une situation aussi brutale qu’injuste. MV ». 
Ce mode de communication ne me paraît pas digne d’une action gouvernementale : il n’est pas possible de traiter un pareil problème en 140 caractères ! On sent, derrière, l'urgence d'une intervention, la nécessité de se démarquer d'un problème social, l'impression de devoir éteindre un feu.
Je pense à l’encyclique du pape François qui parle du « drame de l’immédiateté politique ». L’homme politique réagissant instantanément à toute situation agit comme une boule de billard qui se déplace en fonction des impacts qu’elle subit : sa trajectoire est désordonnée, inintelligible et sans projet établi.

On peut comprendre l'usage de Tweeter pour aller vite et toucher du monde. Mais, c'est prendre, pour un politique, le risque de montrer que l'on s'est laissé surprendre : " Je n'ai pas vu venir cette question, me voilà, j'arrive ! ".
On peut comprendre également l'usage de ce réseau, car ce moyen de communication est censé donner une image moderne. Mais, attend-on de nos hommes politiques qu’ils agissent en vue de se donner une image ?

On les attend sur le domaine de l’efficacité en vue du bien commun.